Une lecture commencée par hasard pour tester mon Kobo, qui se transforme en premier coup de coeur de l'année ! Ce roman de mille pages est un vrai page turner, on enchaîne les chapitres et on ne peut plus s'arrêter... mieux encore, on n'a plus envie que ça s'arrête !
Je n'avais pas prévu de le lire aussi vite et pourtant il m'a transportée dès la première ligne, si certains ont appris la première phrase de L'étranger de Camus par coeur, pour moi ce sera celle d'Anna Karenine.
"Happy families are all alike ; every unhappy family is unhappy in its own way"
Je l'ai lue et relue plusieurs fois, dès les premiers mots de Tolstoï, j'étais déjà sous le charme.
On la sent la différence entre un auteur cultivé, philosophe, scientifique et intelligent, et un auteur juste doué et sensible. Tolstoï a certainement tout d'un auteur accompli. Anna Karenine est un vrai trésor : une histoire captivante, plusieurs intrigues très bien menées, énormément de personnages très bien décrits, très intéressants et bien approfondis. Une véritable encyclopédie et fenêtre ouverte sur la Russie de la fin du 19ème siècle, on en apprend sur la culture de l'époque, la vie quotidienne entre noblesse pétersbourgeoise, moscovite et prolétaires, la place que la religion a commencé à occuper au sein de la société, l'évolution de la politique, l'importance de l'éducation... etc.
Tolstoï est un romancier doué qui sait tenir ses lecteurs en haleine, et un excellent philosophe qui sait faire réfléchir ses disciples tout au long du roman sur une infinité de sujets captivants et essentiels tel que l'existence, Dieu, la justice, l'éducation et l'importance des écoles... ou pas, la foi, l'amour, le bonheur, la mort... etc.
L'histoire en bref : Anna Karenine est une femme qui ne laisse personne indifférent, d'une beauté exceptionnelle, tout le monde tombe sous son charme quelque soit l'age et le sexe. Épouse d'une grande personnalité russe, Alexis Alexandrovich, elle trouve son mari froid et incapable de sentiments, une machine comme elle aime l'appeler. Un mariage de raison conclu trop tôt, elle ne connait l'amour que plusieurs années plus tard, dès qu'elle croise le regard du jeune comte Alexis Wronsky...
Dans ce roman, j'ai personnellement retenu trois personnages principaux :
Levine : mon préféré, et qui est à mes yeux le véritable héros du roman. Il n'est ni un prince ni un comte, il habite à la campagne et cultive ses terres avec l'aide de ses travailleurs. Il est très cultivé, il lit beaucoup, réfléchit tout le temps, et trouve la vie inutile tant qu'on n'en a pas déchiffré le sens. C'est sa véritable quête tout au long du roman. Il est propriétaire de ses terres et est en même temps mal à l'aise face à cette situation, comment être sûr d'être totalement juste quand il est le maître et possède une équipe qui travaille pour lui. Levine aimerait abolir les classes sociales et les hiérarchies mais ne trouve toujours pas la solution à son dilemme : il aimerait partager ses propriétés avec ses travailleurs, mais il n'aurait plus les moyens de subvenir à ses besoins alors ; il garde tout pour lui et il ne serait pas juste envers ces travailleurs qui travaillent plus dur que lui pour labourer ces terres... Levine est un homme de valeurs, soucieux de mener une existence utile. Il est l'un de mes personnages préférés de tous les temps. Je pourrai parler encore longtemps de lui...
Anna : le personnage que j'ai le plus détesté dans le roman, je l'ai trouvée irresponsable et immature, elle a connu l'amour trop tard et est tombée dans le piège de la fille "trop" amoureuse. Jalousie, angoisse, dilemmes... l'amour la tuera.
Alexis Alexandrovich : j'ai beaucoup aimé et compris ce personnage, mari d'Anna, l'époux trahi... Derrière sa froideur se cache un homme qui souffre, il m'a beaucoup touchée et j'ai eu pitié de lui souvent. Tiraillé entre la religion, ses sentiments et sa notoriété dans la société, son indécision et son manque d’intransigeance envers Anna m'ont énervée plus d'une fois. C'est un personnage très intéressant, et charismatique malgré tout.
Pour mieux apprécier cette lecture : une bonne culture russe et communiste m'aurait permis de savourer ce roman encore plus.
J'ai été conquise par la qualité des échanges et des dialogues de haut niveau de l'époque, ainsi que l'importance accordée à l'éducation alors...
J'ai adoré la finesse de Tolstoï dans la description de ses personnages, il m'a rappelé Jane Austen et là je me suis dit que les auteurs classiques avaient le don de prendre leur temps en écrivant, mais aussi dans leur vie quotidienne, prendre le temps d'observer les gens, de les analyser et de sans doute s'analyser soi-même.
Une excellente lecture ! A lire !